vendredi 13 avril 2007

Le train de l'aventure


De : Le Colonel

Messieurs bonjour,


Quelques lignes afin de vous conter mon exceptionnelle aventure de ce matin.

Il s’avère que pour aller « bosser », je prends le train. Incroyable non ? Bon. Voilà déjà la première partie de l’aventure.


Figurez vous que j’en prends même deux.

Alors là, ça devient carrément palpitant n’est-il pas ?


Bref. Au risque de vous décevoir, le meilleur n’est pas là.


Ca fait déjà un petit bout de temps que ça dure ces petits trajets en train. Du coup, je ne fais plus trop gaffe à grand-chose, ni aux kosovars qui rentrent des chantiers avec leurs petits sacs à dos et au bout de doigts encore blancs du plâtre remué, ni aux costards-cravates qui lisent les pages roses du figaro et rient en pouffant du nez, ni aux lascars qui écoutent du rap haut et fort avec leurs portables et qui regardent tout le monde avec des yeux qui disent « je t’emmerde », ni aux turcs qui affichent une dent sur deux sous leurs moustaches, ni à tous ces gens qui parlent super fort ou dans des langues que je ne comprends pas (« Wooulli oulganama biambollo ! »). Bref, je descends, je prends mon train, je remonte et je vais me faire chier.


Mais voilà qu’aujourd’hui, une sorte de peur palpitante a réussi à me sortir de mon zonage quotidien…


Mon trajet en RER D se déroule à merveille. Une nana en face de moi se tape MUSE à fond dans son MP3. Mon voisin de droite s’assoit limite sur mes genoux (il ne m’a même pas vu. Il doit mesurer 2m13 et peser 122 kg et me voilà collé à la fenêtre). Imperturbable, je continue à lire le chapitre sur les nitrates dans Mal de Terre de Hubert Reeves.

J’arrive à Gare de Lyon. Rien à signaler. Je fais la gueule. Tout m’emmerde. Je regarde mes pompes en marchant. Un début de journée de semaine classique.

Je m’engage dans les escaliers me menant au quai du RER A, direction Marne la Vallée Chessy.

Comme tous les matins, je passe entre les cabines téléphoniques et le Relais H. Comme tous les matins, je jette un œil au panneau d’affichage. Comme tous les matins je fais une petite pause au Relais H et je m’attarde sur les couvertures de National Géographique, Grand Reportage, Géo et Ushuaïa et comme tous les matins, pantois devant ces couvertures, je lâche un « les enculés… ».

Mon train arrive. Je détache mes yeux des couvertures. Je m’élance vers mon train tel un Bambi dans la forêt.


D’après l’affichage sur le quai, le train n’est pas omnibus. Qu’importe. Je monte….

Et une douce voix annonce…… « Contrairement à l’affichage sur le quai, ce train ne desservira pas les gares de X et Y » puis le conducteur enchaîne « Veuillez ne pas tenir compte de l’annonce faite sur le quai ni de l’annonce faite à l’instant dans le train »….

Je suis frappé de stupéfaction.


Mon rythme cardiaque s’emballe. Une goutte de sueur froide coule le long de mon visage. Mon souffle se fait court. Mes mains deviennent moites. Grand Dieu…… !
Mais……. je suis monté dans LE TRAIN DE L’AVENTURE QUI NE VA NULLE PART ET PARTOUT !!


L’inconnu me frappe de plein fouet. Mais où allons-nous alors ? Où mène ce train ? C’est incroyable... Je n’ose penser à la décision que je dois prendre immédiatement car la sonnerie retentit… Dois-je rester dans ce train fou dont je ne connais pas la destination ?!

Vite Colonel. Vite. Décide-toi. La foule panique. Des hurlements retentissent.
Une immense vague d’individus affolés se rue vers les portes, dans les couloirs.
Des femmes, des enfants tombent à terre piétinés par des humains sans foi ni loi que la terreur condamne à la barbarie.

Ma vie, par flashs successifs, se déroule devant mes yeux. Je sais que je n’ai plus que quelques instants pour me décider.

Vite. Vite Colonel.


Un temps suspendu. Je prends pleine mesure de ce qui se passe autour de moi. Etrangement serein. Je m’accroche à la barre, lève la tête. Je viens d’accepter mon destin. Je reste. Les portes se ferment.


Le train s’ébranle. Doucement, le train s’enfonce dans la noirceur d’un tunnel…


« Mesdames, Messieurs, contrairement à l’affichage, ce train sera sans arrêt…krrrrrrr…. »

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